
Les Talens lyriques aux Invalides
Depuis plus de 30 ans, Christophe Rousset et Les Talens Lyriques s'emploient à révéler et sublimer les chefs-d'œuvre emblématiques, ainsi que les trésors méconnus du répertoire baroque, qui ont façonné leur renommée.

Depuis plus de trente ans, l’ensemble des Talens Lyriques de Christophe Rousset s’attache à éclairer et exalter les œuvres les plus emblématiques mais aussi les plus rares, notamment au sein du répertoire baroque dans lequel il excelle.
Ce programme « Louis XIV au crépuscule » s’ouvre avec la sonate en trio La Steinkerque, et ses « bruits de guerre ». Cette sonate, composée par Couperin dit « Le Grand » en 1692, fait référence à la bataille éponyme ayant eu lieu la même année. Les vingt dernières années du règne de Louis XIV furent marquées par plusieurs batailles emblématiques comme celle de Steinkerque, bataille de la Guerre de neuf ans, ayant permis à la France de garder la ville de Namur.
Ces vingt dernières années de la vie du roi sont également marquées par la mort de Lully et par l’accès à la notoriété des compositeurs François Couperin et Michel Pignolet de Montéclair, tous deux mis à l’honneur dans ce programme. Pédagogues et amis, le dernier ayant même enseigné la musique aux enfants du premier, ils se placent l’un et l’autre à la charnière du XVIIe et du XVIIIe siècle. Leurs compositions se caractérisent également par le mélange du style français et du style italien.
Les œuvres de François Couperin interprétées dans ce programme se distinguent par leur diversité : des sonates en trio inspirées par le style italien, une cantate, mais aussi des airs sérieux et un air à boire, « Souvent dans le plus doux sort », dont la partie de basse continue fut ajoutée par Christophe Rousset. La cantate de Montéclair, quant à elle composée après la mort du souverain, s’inscrit dans le même style que celles de son ami Couperin.
Les Talens Lyriques et le jeune baryton-basse Lysandre Châlon, dirigés par Christophe Rousset, nous offrent à travers ce beau programme, des œuvres représentatives de la richesse de la vie musicale durant le crépuscule du règne du Roi Soleil.
Adèle Bertin – Bibliothécaire et musicologue des Talens Lyriques
Programme
François Couperin (1668-1733)
- La Steinkerque - Sonate en trio (vers 1692)
Gayement, bruits de guerre / Air lentement / Gravement / Légèrement / Mouvement de fanfares / Lentement / Gravement / Gayement
- Ariane consolée par Bacchus, cantate (1708)
- La Superbe - Sonate en trio (vers 1695)
Lentement / Gayment / Très lentement / Légèrement / Air tendre / Gayement
« Qu’on ne me dise plus » (air sérieux, 1697)
« Doux liens de mon cœur » (air sérieux, 1701)
« Souvent dans le plus doux sort » (air à boire)
- Sonate La Visionnaire – Sonate en trio (1726)
Gravement / Légèrement / Air Légèrement / Légèrement / Lentement / Gayment / Air tendrement / Légèrement, chaconne
Michel Pignolet de Monteclair (1667-1737)
- L’enlèvement d’Orithie – Deuxième Livre (1713)
Distribution
- Lysandre Châlon, basse
- Gilone Gaubert & Benjamin Chénier, violon
- Atsushi Sakaï, viole de gambe
- Christophe Rousset, clavecin et direction
Christophe Rousset

Fondateur de l’ensemble Les Talens Lyriques et claveciniste internationalement reconnu, Christophe Rousset est un musicien et chef d’orchestre inspiré par sa passion pour l’opéra et la redécouverte du patrimoine musical européen.
L’étude du clavecin à la Schola Cantorum de Paris avec Huguette Dreyfus, puis au Conservatoire royal de la Haye avec Bob van Asperen (il remporte à 22 ans le prestigieux 1er Prix du 7e concours de clavecin de Bruges), suivie de la création de son propre ensemble, Les Talens Lyriques, en 1991, permettent à Christophe Rousset d’appréhender parfaitement la richesse et la diversité des répertoires baroque, classique et préromantique.
Christophe Rousset est aujourd’hui régulièrement invité à se produire avec Les Talens Lyriques dans toute l’Europe : Opéra national de Paris, Opéra-Comique, Théâtre du Châtelet, Opéra national des Pays-Bas, Concertgebouw Amsterdam, Théâtre des Champs-Élysées, Philharmonie de Paris, Opéra de Lausanne, Theater an der Wien, Staatsoper de Vienne, Opéra royal de Versailles, La Monnaie de Bruxelles, Wigmore Hall et Barbican Center de Londres, Bozar Bruxelles...ainsi que pour des tournées dans le monde entier au Mexique, Nouvelle-Zélande, Canada, USA etc.
Parallèlement, il poursuit une carrière active de claveciniste et de chambriste en se produisant et en enregistrant sur les plus beaux instruments historiques. Ses enregistrements des œuvres pour clavecin de Louis et François Couperin, Rameau, D’Anglebert, Royer, Duphly, Forqueray, Balbastre, Scarlatti et les divers enregistrements consacrés aux pièces de J. S. Bach (Partitas, Variations Goldberg, Concertos pour clavecin, Suites anglaises, Suites françaises, Klavierbüchlein, Clavier bien tempéré) sont considérés comme des références.
La dimension pédagogique revêt une importance capitale pour Christophe Rousset qui dirige et anime des masterclasses et académies : CNSMDP de Paris, Académie d’Ambronay, Fondation Royaumont, Opera Studio de Gand, OFJ Baroque, Junge Deutsche Philharmonie, Accademia Chigiana à Sienne, Amici della Musica à Florence, Piccola Accademia à Montisi, ou encore le Britten-Pears Orchestra.
Christophe Rousset poursuit enfin une carrière de chef invité : Liceu de Barcelone, San Carlo de Naples, Scala de Milan, Opéra Royal de Wallonie, Royal Opera House de Londres, Orchestre national d’Espagne, Orchestre philharmonique de Hong Kong, l’Orchestre du Théâtre Royal de la Monnaie, the Orchestra of the Age of Enlightenment etc.
Il se consacre également à la recherche musicale et à l’écriture, à travers des éditions critiques et la publication de monographies consacrées à Rameau (2007, Actes Sud) et à François Couperin (2016, Actes Sud). Son livre d’entretiens sur la musique réalisé par Camille de Rijck (2017, La Rue Musicale / Philharmonie de Paris) est paru sous le titre L’impression que l’instrument chante.
Un de ses derniers enregistrements L’art de la Fugue (Aparté, 2023) a été salué par la critique « Rousset, qui a déjà enregistré une grande partie de l'œuvre pour piano de Bach, maîtrise cette œuvre phare de l'art polyphonique avec brio. » (Concerti, janvier 2024).
On notera les autres récentes parutions chez Aparté des albums : Le manuscrit de Madame Théobon (Lully and others), Pièces de Viole avec Atsushi Sakai et Marion Martineau (Marin Marais), The Sphere of Intimacy avec Cyrille Dubois (François Couperin and Others).
Cette saison paraîtra une superbe réédition digitale de l’Intégrale des pièces de clavecin François Couperin (Harmonia Mundi – août 2024) et Christophe Rousset conclura son exploration du corpus pour clavier de J.S. Bach avec les Complete Toccatas (Aparté - octobre 2024).
Christophe Rousset est Chevalier de La Légion d’Honneur, Commandeur des Arts et des Lettres et Officier de l’Ordre national du Mérite.
Lysandre Châlon

Lysandre Châlon, baryton-basse, commence le chant au Conservatoire de Meaux avant de poursuivre son cursus au Conservatoire à rayonnement régional de Paris avec Jean-Philippe Zielinski. Il étudie actuellement en master au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris dans la classe de Frédéric Gindraux et se perfectionne dans des masterclasses auprès de Véronique Gens, Iñaki Encina Oyon, Irène Kudela et Alain Buet.
Familier du répertoire baroque il a récemment interprété au sein du conservatoire le rôle d’Énée dans l’opéra éponyme de Purcell sous la direction de Leonardo García Alarcón, des grands motets français sous la direction d’Emmanuelle Haïm, ainsi que des cantates et motets de Bach auprès de Christophe Coin et Richard Myron. Actuellement, il travaille avec l’ensemble Correspondances dans divers projets d’ensemble vocal ainsi que dans le rôle du Guerrier de David et Jonathas de Charpentier.
Il sera bientôt dans les rôles d’Ubalde et Aronte dans Armide de Lully à l’opéra Comique avec les Talens Lyriques. Également habitué du répertoire mozartien, il interprète Guglielmo dans Così fan Tutte avec la compagnie Opéra Éclaté, le Comte dans Les Noces de Figaro avec Les Chants Égarés et sera prochainement dans le rôle de Papageno avec la compagnie Opéra des Landes. Parmi ses autres rôles on compte notamment Belcore de L’Elixir d’Amour.
Il aborde en parallèle la musique sacrée avec le Requiem de Mozart, la Petite Messe Solennelle de Rossini, le Stabat Mater et le Requiem de Dvorak, ainsi que le Requiem de Fauré.
Dans la mélodie et le lied il compte notamment à son répertoire Ropartz, Ibert, Duparc, Schubert, Brahms, Wolf, Vaughan Williams et Gerald Finzi.
Textes chantés
François Couperin (1668-1733)
Arianne consolée par Bacchus (1708)
Récitatif
Sur les bords d’une île sauvage,
La triste fille de Minos pleurait la perte
d’un volage
Que loin d’elle emportait et les vents et les flots.
Quelle était sa douleur mortelle,
Quels sanglots, quels transports,
Quels pleurs, quels cris perçants !
Tantôt elle priait les vents de ramener
son infidèle,
Tantôt elle voulait que les flots furieux
Le fissent périr à ses yeux.
Vain courroux que bientôt demandait
sa tendresse,
Vaincue enfin par sa douleur,
Elle tombe sans voix, sans force, sans couleur,
Abandonnée à sa faiblesse.
Air
Amour, vante cette fois
La justice de tes lois
Et la douceur de tes chaînes.
Quel cœur t’offrit plus de vœux,
Quel cœur vit payer ses feux
Par de plus cruelles peines ?
Récitatif
Ariane en cette langueur
Allait finir son destin déplorable,
Lorsqu’une main secourable
Verse en sa bouche une douce liqueur
Qui rappelle ses sens et ranime son cœur.
Elle ouvre un œil mourant
Et quel objet l’étonne,
Elle voit à ses genoux
Un dieu jeune et charmant
Que le pampre couronne.
Il a la coupe en main, les yeux brillants et
doux.
L’Amour l’avait instruit du sort de la princesse
Et vers ce lieu fatal avait conduit ses pas.
« Vivez ! » lui disait-il, « Que votre douleur cesse,
Bacchus vient secourir et venger vos appas. »
Air
Pouvez-vous pleurer un barbare ?
Vous méritez un sort plus doux.
Ariane, que perdez-vous
Que ma tendresse ne répare ?
Bacchus, de vos chaînes content,
Vous jure une ardeur éternelle.
Un dieu soumis, tendre et fidèle,
Vaut bien un mortel inconstant.
Récitatif
Tandis qu’il parle ainsi, la princesse en soi-même,
De son nouvel amant compare les attraits
Avec la perfidie extrême
D’un ingrat qui la quitte après tant de bienfaits.
Plus sa vengeance sera prompte,
Plus tôt de son injure elle efface la honte.
Le dieu voit sa pensée et dans ce doux moment
À ses discours flatteurs joint de nouveaux serments,
L’assure qu’un sort digne d’elle
La doit couronner dans les cieux.
Elle cède à la fin, un hymen glorieux
Livre aux feux de Bacchus sa conquête nouvelle.
Air
Chantons sans fin
Le dieu du vin.
D’un amour tranquille,
Il réveille les feux
Et des malheureux
Il devient l’asile.
François Couperin
« Qu’on ne me dise plus » (air sérieux, 1697)
Qu’on ne me dise plus que c’est la seule absence
Qui peut guérir nos cœurs de l’amoureux poison.
J’aime Iris en secret, j’évite sa présence,
Ce remède cruel accable ma raison.
Absente je la vois, à tous moments j’y pense,
Et cherchant à guérir je fuis ma guérison.
François Couperin
« Souvent dans le plus doux sort » (air à boire)
Souvent dans le plus doux sort,
Le plus tendre amour s’endort
Si Bacchus ne le réveille.
L’hymen tient son feu de l’amour.
L’amour quelquefois à son tour
Doit le sien au dieu de la treille.
François Couperin
« Doux liens de mon cœur » (air sérieux, 1701)
Doux liens de mon cœur
Aimables peines,
Charmantes chaînes,
De moment en moment
Redoublez mon tourment :
Un cœur exempt de nos tendres alarmes,
Ne ressentit jamais que de faibles douceurs ;
C’est dans l’excès de ses rigueurs,
Que l’Amour a caché ses plus doux charmes.
Michel Pignolet de MONTECLAIR (1667-1737)
L’enlèvement d’Orithie – Deuxième Livre (1713)
Récitatif
L’impétueux Borée, épris des plus beaux feux,
En vain près d’Orithie employait la tendresse,
Las de gémir pour l’objet qui le blesse,
Las de voir rejeté l’hommage de ses vœux,
Son cœur cédant enfin au transport qui le presse,
Un tendre emportement le rendit plus heureux.
C’est trop perdre, dit-il, de sourires et de larmes,
Près d’Orithie employons d’autres armes.
[Air]
Sortez, tonnez, vents furieux,
Excitez un affreux orage,
Confondez la terre et les cieux,
Que rien n’échappe à votre rage.
Livrez la guerre aux éléments,
Forcez jusqu’aux Royaumes sombres ;
Et par d’horribles sifflements,
Allez épouvanter les ombres.
Récitatif
Il dit, et déchaînant ces fiers tyrans des airs,
De leurs souffles bruyants il remplit l’univers.
Le jour fuit et se change en une nuit profonde,
Dans un nuage épais la foudre vole et gronde.
La mer frémit, s’irrite et ses flots jusqu’aux cieux
Portent avec fureur cent monts audacieux.
L’air mugit de courroux, la terre est ébranlée.
De Pluton interdit la demeure est troublée ;
Et la terre, les airs, les enfers et les flots
Semblent prêt à rentrer dans un affreux chaos.
Récitatif
Borée alors, dans un désordre extrême,
S’approche d’Orithie, et plein d’un doux espoir,
Il embrasse, il saisit ce fier objet qu’il aime,
Et vole vers les lieux soumis à son pouvoir.
Air
Vénus approuve son audace,
L’Amour fait triompher ses feux,
De cet amant il suit la trace
Il blesse l’objet de ses vœux.
Pour célébrer cette victoire,
Le dieu vole avec les plaisirs.
L’Hymen pour couronner sa gloire
Se vient offrir à ses désirs.
Récitatif
Quelle brillante cour vers la Thrace s’arrête ;
L’éclat du plus beau jour succède à la tempête.
L’Amour, les ris, les jeux dans cet empire épars,
Font goûter les plaisirs qu’un doux hymen apprête.
Orithie aime enfin, et ses tendres regards
Assurent son amant du prix de sa conquête.
Favorable transport, heureux emportement,
Borée enfin par vous voit finir son tourment.
Air léger
Amants, tout cède à la constance,
L’amour triomphe du mépris ;
Le secours de la violence,
De vos feux obtiendra le prix.
L’objet qui résiste à vos larmes
Et se défend de vos soupirs
Souvent se rend à d’autres armes
Et comble vos plus chers désirs.
Important
Accès unique pour les concerts de 20h par le 129 rue de Grenelle (Face au pont Alexandre III).
Il est nécessaire d'acheter ses billets à la billetterie sur place de 10h à 17h30 ou en ligne